" ...dans une société où s’absenter de soi-même paraît le comble de l’improbable. On est en permanence dans l’exigence d’être soi-même, de se personnaliser, de montrer qu’on est à la hauteur etc.... la sacralité du monde est banalisé ...Il n’y a plus besoin de journal intime, le SMS banalise les événements. On est souvent aussi contraint de lire ses mails tous les jours… Il n’y a plus de possibilité de repli. Comme le dit très bien l’écrivain Emil Cioran: «Nous avons été dépossédés de tout, même du désert». Cette phrase me hante depuis toujours. J’ai vu progressivement cette zone d’intimité se réduire. Et finalement, même quand vous décidez de ne pas jouer le jeu, vous êtes poursuivi par ceux qui continuent. Internet a resserré la pression sur des milliards d’individus, provoquant le burn-out dans le monde du travail. On appelle les gens au milieu de leurs vacances, le soir… C’est la technologie de la traque.
– Le fait de s’aménager des moments de «disparition de soi» évite-t-il la «blancheur» négative?
– Oui! On voit se développer le yoga, la méditation, les stages de silence en monastère… Des millions de gens cherchent ce moyen de tenir le coup, de résister. Certaines personnes choisissent de s’installer dans des conditions de survie, par lassitude du monde. C’est une solitude choisie, et évidemment il y a aussi celle qui s’impose, avec l’isolement contraint. Mais beaucoup de nos contemporains cherchent la solitude, car ils sont saturés d’un lien social qui devient exaspérant..."
Un lieu pour " disparaitre de soi" en pleine conscience